Insomnies chroniques

Sans réveil, sans coup de fil, sans question, juste moi et le café. Le soleil aussi. En ce moment il se tord le cou pour réfléter juste sur mon écran, il a trouvé l'angle parfait pour m'embêter. Et puis je n'arrive pas à publier correctement, ni ici, ni ailleurs. C'est une conspiration vous croyez ?
Pourtant je suis bien, n'ai pas envie spécialement de parler, d'écrire peut-être un peu plus mais rien ne m'en empêche; la preuve...

Aujourd'hui deux novembre. Mon loyer est payé, mes comptes aussi(euh...la plupart en tout cas...). J'ai fait une bonne semaine de boulot, vraiment bonne. Ce qui me réjouit particulièrement c'est que malgré la charge je n'ai pas paniqué et je suis passée à travers tout. À part peut-être un petit mouvement d'impatience envers un ami qui voulait me voir là maintenant et pas selon ma disponibilité mais ça aussi c'est vite passé.

J'ai plusieurs choses à faire ce week-end mais là non plus je ne m'énerve pas. Je ferai de mon mieux. La priorité serait de m'acheter des bottes parce que la neige est à nos portes. Et des bas aussi. Je déteste m'acheter des bas mais pour l'hiver c'est indispensable. Et une fois que mon tiroir sera bien garni je n'aurai pas à perdre du temps la matin pour en trouver une paire convenable. Ça semble très simple mais c'est un élément non-négligeable les matins de travail. Et pour les bottes, si j'en trouve bien sûr, c'est juste un irritant de moins pour le matin où je m'éveillerai et que tout sera blanc dehors.

Voilà, la vie peut-être bien simple quand on l'aborde du côté matériel des choses et en ce moment j'ai besoin de simplicité plus que jamais.

Rempli de petites tornades douces. Comme cette amie qui m'a téléphoné au bureau en tout début de matinée rien que pour me souhaiter une belle journée. Pas pour me raconter, pas pour me demander, juste pour me faire la bise et me dire qu'elle avait une pensée pour moi dans son matin. C'est tout bête mais rien qu'à l'écrire je suis émue. Il faut croire que ces petites attentions me font du bien, À qui n'en feraient-elles pas ?
Comme cette autre amie rentrée chez elle en France au début d'octobre qui m'a écrit quelques mots pour me dire qu'elle me reconnaissait dans mes écrits ici. Ça aussi c'est tout simple mais combien ça m'a fait plaisir. Ça m'a aussi rassurée car elle a sans le savoir, confirmé mon travail d'authenticité. J'ai décidé un jour de transparaître dans mes écrits mais qui de mieux placée qu'une amie terrestre pour me le confirmer ?
Comme ce client venu me rencontrer de bon matin pour me raconter ses pas en matière de recherche d'emploi, pour me dire combien il a confiance de trouver bientôt. C'est un beau métier que je fais mais parfois les gens viennent nous voir seulement quand ça ne va pas. Ça fait du bien de partager aussi leurs petits succès à l'occasion.
Comme cette autre cliente, tellement courageuse, qui cherche depuis plus d'un an, Oui, un an, elle est acharnée vous ne trouvez pas ? Eh bien aujourd'hui elle m'a téléphoné pour me dire qu'elle débutait son nouvel emploi demain matin, celui qu'elle désirait. Je suis tellement contente pour elle. C'est un truc très chouette à partager.
Et cette collègue avec qui j'ai déjeûné qui m'a fait une réflexion gentille et sincère sur ma façon de travailler. Ça fait un bien fou d'être reconnue.
Bien sûr il y a eu deux ou trois trucs un peu moins agréables. C'est normal.
Comme de découvrir que mon Fredoux n'est pas toujours tout doux... Et qu'il lui arrive d'exprimer sa frustration de façon irrespectueuse pour moi. Graver un grafitti sur le mur du couloir par exemple, en espérant que je ne devine pas que c'est lui.
Ou alors mon fils aîné qui rate son bus pour l'école et qui me téléphone pour me remettre tout entre les mains à sept heures du matin, sous prétexte qu'il ne peut rejoindre son père. Qu'est-ce que je peux faire sans voiture à des kilomètres de chez lui ? Certainement pas cautionner son absence de l'école, ça non.
Ou ce bus 45, rempli à craquer, le chauffage au maximum, impossible de respirer, et tellement hâte d'arriver.

Ça n'était qu'une journée, et elle n'est même pas terminée, sauf que jusqu'à maintenant, je pense que je suis bien choyée.

Déjà...
Pourtant le temps était magnifique aujourd'hui. Ce matin, sans doute à cause du passage à l'heure normale, le soleil était bien haut dans un ciel bleu infini quand je suis sortie pour aller au boulot. J'avais presque l'impression d'être en milieu d'avant-midi. Les arbres commencent à se dénuder sérieusement mais il reste encore assez de feuilles dans certains d'entre eux pour nous permettre d'admirer les couleurs lumineuses auxquelles même les photos ne rendent pas justice. C'est beau l'automne à Montréal, ça fait juste un peu peur parce qu'on sait ce qui vient après.

Je vais bien aujourd'hui. C'était pareil hier et ce week-end c'était pas mal du tout. On dirait que je me sens plus solide, que je vois plus clair et que je dramatise moins. Je ne sais pas trop l'expliquer mais je l'apprécie vraiment. Si ça peut durer, si cette impression d'avancer peut ne pas me faire faux-bond. Je sais, je risque de l'effrayer si j'en parle ainsi, mais je ne peux m'empêcher de m'étonner en repensant à l'état d'esprit qui m'habitait la semaine dernière...

Finalement j'ai choisi le chemin de la non-évidence, ne me reste plus qu'à l'assumer, même si la mastication d'éléphant a des côtés plutôt désagréables à l'occasion. (!)
C'est tout bête mais j'ai vraiment le sentiment de grandir et d'avancer, comme si certains pans de ma nouvelle réalité m'apparaissaient tout à coup comme des piliers importants sur lesquels j'avais tendance à me buter au lieu de m'y appuyer. Et si ça passait par là ? Juste un regard différent sur ce qui est. Un peu comme l'effet du soleil d'automne après le retour à l'heure normale, qui nous déroute un peu mais qui nous fait voir les choses sous un angle nouveau.

Hmmm... J'y réfléchis :-)

Ma stature forte qui fait trop souvent oublier ma douceur et ma fragilité. Mes joues rondes qui rougissent de tout, tout le temps. Mon ventre qui paye cher le privilège d'avoir porté la vie et mon menton que j'aurais aimé plus fin.

Voilà, c'est moi. En pièces détachées. Il n'y a que le tout que je n'arrive pas à saisir.

Mes yeux, mes mains, mes jambes, parfois.
Les premiers sont clairs et profonds, ils parlent parfois plus que mes mots, les deuxièmes sont fortes et agiles, tendres et caressantes à l'occasion, les troisièmes sont solides et musclées, elles me mènent où je veux aller.
C'est pas mal, non ?

Que j'aime bien mes cheveux qui sont trop... Fouillis ? Sauvages ? Bouclés ? Épais ? Ils sont tout ce que je ne permets pas d'être devant vous finalement. Parfois je les attache derrière, je les retiens avec un bandeau, ou alors je dégage mon visage avec des barettes bleues que J. m'avait offertes il y a des lunes. Ensuite je les laisse cascader, libres, fous. Je ne veux pas être sage et pratique. Adopter un style de coiffure qui m'avantagera mieux. Mes cheveux sont la partie de moi que personne n'arrivera à anéantir. Sauf le temps, bien sûr. En attendant je les laisse être. C'est déjà ça :-)

Un regard dans la glace, un sourire qui s'esquisse, des cheveux, partout.
Comment expliquer cette quête depuis toujours.
Maman, je suis jolie ? Je suis bien comme ça ? Ça peut aller ?
Mais oui ma fille, tu es correcte, ça peut aller... Mais dis-moi donc pourquoi tu as tant besoin de l'entendre ? Pourquoi ce manque de confiance ? Et puis, si tu veux savoir, tu pourrais être plus... ou moins... Si seulement tu voulais vraiment.
Moi je n'en sais toujours rien. Pourquoi cette question perpétuelle dans ma tête ? Est-il possible que je ne veuille pas vraiment ? Depuis toujours ces doutes.
Est-ce que ça finira un jour ?